Hausse des besoins en travailleurs agricoles étrangers

Avec la pénurie de main-d’oeuvre, les travailleurs temporaires latino-américains sont de plus en plus indispensables aux producteurs agricoles. Or cette nouvelle réalité va nécessiter des adaptations, selon un rapport déposé cet automne.

« Les défis administratifs et de gestion des ressources humaines ne cessent de prendre de l’ampleur », peut-on lire dans un rapport produit cet automne pour le Comité sectoriel de main-d’oeuvre de la production agricole par la firme privée AGÉCO.

« Parmi ces défis, notons des problèmes d’intimidation et de harcèlement entre travailleurs, des conflits entre clans, la gestion des transports pour les visites médicales, l’analphabétisme qui pose un obstacle de communication important, la gestion des logements… »

En 2018, pas moins de 15 399 travailleurs étrangers temporaires (TET) ont rejoint les équipes de plus de 1200 entreprises agricoles au Québec. La grande majorité est venue du Mexique et du Guatemala.

Le Comité sectoriel, connu aussi sous le nom d’Agricarrières, est affilié à l’Union des producteurs agricoles. Il commande tous les cinq ans un portrait de la main-d’oeuvre dans le domaine.

D’entrée de jeu, le document souligne que « le besoin d’embaucher des travailleurs étrangers est en croissance, et [que] cette croissance devrait s’intensifier ». En fait, on estime qu’en 2029, le déficit de main-d’oeuvre s’élèvera à 19 000 postes.

Dans le passé, cette main-d’oeuvre était surtout employée par des producteurs de petits fruits ou de légumes. Or, on y recourt de plus en plus dans la production animale, notent les auteurs de l’étude.

« Les fermes laitières marquent la plus grande progression dans le recrutement de ces travailleurs », écrit-on, en soulignant qu’ils sont surtout affectés à la traite et aux tâches à l’étable. À l’inverse, plusieurs producteurs maraîchers sondés dans le cadre de l’étude reprochent aux jeunes travailleurs étrangers d’être moins productifs que ceux qu’ils recrutaient dans le passé.

Désireux de rester

Dans le cadre de la recherche, près de 200 travailleurs étrangers ont répondu à un questionnaire en espagnol. Parmi ces derniers, 62 % jugent ne pas être assez payés pour l’ampleur des tâches qui leur incombent et plus du tiers ont dit ne pas avoir suffisamment de temps de repos et de pause.

Le salaire horaire moyen en agriculture en 2018 était de 17,91 $ l’heure. C’est plus de 38 % mieux qu’il y a dix ans (12,94 $), mais encore sous la moyenne de l’ensemble des travailleurs.

L’étude observe également que « de la pression est ressentie » chez les travailleurs étrangers et qu’ils « méconnaissent » leurs droits (plus de 70 % des sondés). Il leur arrive d’ailleurs plus souvent d’être victimes d’accidents, comme l’avait révélé Le Devoir en mai.

Les entrevues avec les producteurs révèlent aussi que, dans les grandes fermes, « des clans seraient parfois présents, et il y aurait davantage de cas de harcèlement, ce qui mènerait parfois à des épisodes de violence verbale ou physique entre les travailleurs ».

En revanche, l’enquête révèle qu’une majorité souhaiterait suivre des formations pour améliorer leurs compétences et que 83 % souhaitent continuer à travailler au Québec. Les auteurs ajoutent qu’une « forte proportion » souhaiterait faire une demande pour avoir le statut d’immigrant.

Cette dernière donnée doit être analysée avec prudence, selon les auteurs, puisque les répondants méconnaissent le système d’immigration. Ils concluent toutefois que « l’intérêt exprimé par certains TET pour cheminer vers un statut d’immigrant reçu doit […] être entendu » et que « des actions peuvent être posées pour soutenir une telle démarche ».

Enfin, les producteurs critiquent beaucoup les longs délais auprès du gouvernement fédéral pour faire approuver la venue de cette main-d’oeuvre. En 2018-2019, ces délais étaient deux fois plus longs que l’année précédente, le traitement des dossiers étant passé de 21 à 42 jours en moyenne.

Sous un jour plus positif, l’étude fait état de nombreuses initiatives « innovantes ». Ainsi, une entreprise de production en serre s’est associée avec une coopérative de santé « pour faciliter les rendez-vous médicaux de ses TET, et en même temps, offrir l’accès à un médecin de famille à tous ses employés ».

L’enquête mentionne aussi que plusieurs producteurs maîtrisent l’espagnol et souhaitent dès lors offrir plus de formation, voire des cours de RCR en espagnol à leurs employés.

Source : Le Devoir

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