En Amérique du Nord, la plus grande superficie cultivée de bleuets sauvages se trouve au Québec, où 80 % de ces champs sont situés au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Mais les rendements en fruits à l’hectare y sont deux fois moins importants que dans d'autres régions productrices du Maine, du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de l’Île-du-Prince-Édouard.
Par rapport à d’autres cultures comme celles du blé et du maïs, la recherche scientifique sur le bleuet est jeune : elle n'est menée que depuis une trentaine d’années.
Devant la disproportion des rendements d’une région à l’autre, des universitaires et des professionnels se sont associés aux agriculteurs pour mener une vaste étude.
Leur but : optimiser la production de ce petit fruit sauvage dans des pratiques culturales respectueuses de l’environnement.
D’ici 2022, un plan de culture adapté devrait être proposé par le chercheur Maxime Paré, de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), grâce à un partenariat financier avec le Syndicat des producteurs de bleuets du Québec et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
Ces partenaires, en collaboration avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec (MAPAQ) et Agriculture et Agroalimentaire Canada, s’affairent à documenter les pratiques agricoles, tant conventionnelles que biologiques.
Maxime Paré est professeur au Département des sciences fondamentales de l'UQAC. Il est aussi le chercheur principal du plan de culture adapté qui doit être livré d'ici 2022. PHOTO : RADIO-CANADA
À l’échelle régionale, les producteurs s’en sortent bien en termes de volume parce que beaucoup d’hectares sont consacrés au bleuet. Mais on pourrait faire mieux. Si on augmentait un peu la production agricole ou le rendement à l’hectare, le producteur et l’industrie au sens large en sortiraient gagnants.
Le bleuet sauvage est une plante indigène qui pousse naturellement sans semis ni plantation. L’année de la récolte est suivie d’une année de repos pour le plant. Le propriétaire de 100 hectares ne récolte donc qu’une surface de 50 hectares par année.
Premiers résultats encourageants
Dans leurs parcelles expérimentales, les premiers résultats des chercheurs tendent à démontrer qu’il serait envisageable de récolter deux années consécutives.
Les rendements en bleuets sont surprenants, explique le chercheur Paré.
Les résultats sont préliminaires.
Mais avec deux années de récolte de fruits suivies d’une année de repos végétatif, le producteur de bleuets augmenterait la surface en production de 33 %, sans achat de nouvelles terres.
En 2019, la récolte totale de bleuets sauvages au Québec s'est élevée à 75 millions de livres.
Au Nouveau-Brunswick, les données approximatives d’octobre ont établi la récolte à 60 millions de livres. En Nouvelle-Écosse, le volume estimé était de 25 millions de livres et à l’Île-du-Prince-Édouard, de 20 millions de livres.
Le prix de la livre de bleuets sauvages a beaucoup diminué depuis 2011.
PHOTO : RADIO-CANADA
Les engrais et les ruches, des disparités
Contrairement aux producteurs du Québec, qui épandent des engrais une année sur deux, ceux du Maine et des provinces de l’Atlantique le font chaque année, ce qui contribue à doubler le volume de fruits.
L’étude en cours cherche avant tout à trouver la façon de nourrir le sol de manière optimale, soit d'épandre le bon engrais au bon moment.
On ne veut pas tomber dans une culture extracommerciale avec d'importantes quantités d’engrais, on veut une culture durable qui va se maintenir au cours des années.
Un autre facteur qui influence la productivité à l’hectare est la présence des pollinisateurs.
Jusqu’en 2015, le Québec utilisait deux fois moins de ruches que le Nouveau-Brunswick. Sans avoir rattrapé sa voisine, le Saguenay–Lac-Saint-Jean s’améliore grâce entre autres à un programme d’aide à la pollinisation, financé par le MAPAQ.
Tant les engrais que la location des ruches coûtent cher. Et la marge bénéficiaire des producteurs de bleuets est faible.
La dernière année où le bleuet a été payé à un prix avantageux remonte à 2011, quand la livre se vendait à 1 $. Puis les prix ont baissé. En 2016 et 2017, la livre de bleuets sauvages se vendait autour de 30 cents. Et depuis 2018, le prix a remonté à près de 50 cents la livre.
Vers un bleuet biologique
Comme la tendance mondiale est aux aliments biologiques, faire le saut en régie biologique est tentant pour les producteurs.
D’autant plus que les bleuets sauvages biologiques sont payés deux fois le prix du bleuet conventionnel. Un programme de subvention de Québec pour inciter les producteurs à produire sans pesticides a été populaire.
Entre 2018 et 2019, on est allé chercher 42 % d’augmentation au niveau des superficies. On est rendu à 51 producteurs certifiés bio. Puis il y a encore 35 entreprises en présélection.
Qu’elles soient en régie conventionnelle ou biologique, toutes les pratiques culturales seront analysées par l’équipe de recherche de l’UQAC, qui s'attardera aussi aux sols et aux eaux.
Tout cela pour en arriver à offrir un plan de culture adapté aux fermes de bleuets sauvages.
Source : Radio Canada